Le guide Creators pour bouffer gratos aux vernissages
Toutes illustrations sont de Lucile Lissandre

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Le Guide Creators

Le guide Creators pour bouffer gratos aux vernissages

Petits fours, champagne, pains farcis : bâfrez-vous au nom de l'Art sans dépenser un rond.

C'est à l'occasion d'une année d'études aux Etats-Unis, à New-York plus particulièrement, que j'ai découvert le concept de vernissage. Ces événements parfois mondains sont bien connus des étudiants sans le sou (mais aussi des alcooliques) car ils permettent à ces derniers de boire à l'œil, sans carton d'invitation, dans un cadre où tout « n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté ». Il suffit de sillonner les rues du Lower East Side un soir de semaine pour tomber à chaque corner sur un vernissage de galerie, sorte d'open bar pour amateurs d'art, parfaitement gratuit et légal. Pourquoi donc payer une fortune son verre quand on a à disposition une quantité infinie de cubis de vin ? Au-delà de son intérêt purement éthylique, ce cadre raffiné permet aussi de se mêler à des catégories socio-professionnelles qui sont bien souvent hors de portée pour le commun des mortels. N'oublions pas que c'est à un vernissage que Carie Bradshaw fit la connaissance d'Aleksandr Petrovsky, artiste russe fortuné, propriétaire d'un loft à la taille démesurée, qui couvre la chroniqueuse de cadeaux et l'emmène à Paris. Apprenez à être  !

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Et puisque justement, nous sommes à Paris, j'ai le plaisir de vous annoncer qu'il est possible de s'adonner à cette même lubie dans notre chère capitale. On ne vous cachera pas que les vernissages les plus intéressants, les plus richement fournis se font à huis clos et nécessitent une invitation, que vous parviendrez peut-être à vous procurer si vous connaissez une fille en poste au service mécénat d'un grand musée. Si vous ne connaissez pas cette fille et que vous avez soif, je vous conseille de jeter un coup d'œil ici et de vous concentrer plus particulièrement sur l'onglet « vernissage ». Attention toutefois, et c'est là que réside l'intérêt de cet article, tous les vernissages ne mettent pas systématiquement à disposition, de somptueux banquets. Voici donc un petit classement des meilleurs vernissages de Paris, qui ne nécessitent aucune invitation cela va de soi.

L'apéro minimaliste : Air de Paris Il faut s'aventurer rive gauche, dans le 13ème arrondissement pour se rendre dans la galerie d'art contemporain « Air de Paris ». C'est assurément la galerie la plus cool de la capitale et qui a mis hors-jeu depuis bien longtemps les géants de l'art contemporain à Paris. En plus de mettre en avant les artistes les plus renommés et à la pointe, la galerie de la rue Louise Weiss s'avère être l'endroit idéal pour commencer une soirée. Avant toute chose, je vous conseille de ne pas arriver trop tôt, pas avant 19h, vous allez comprendre pourquoi. Contrairement à l'idée que vous pouvez vous faire d'un buffet de vernissage, la tendance aujourd'hui est à la simplicité. Rien à voir avec l'image d'Épinal que vous vous étiez sûrement façonné, un grand banquet du style réception de l'ambassadeur avec serveurs en costume et petits fours.

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Air de Paris respecte cette tradition nouvelle de sobriété, s'inscrivant vraisemblablement dans ce courant de rigueur budgétaire, si cher à notre époque. Sobre peut-être mais chaleureux, il faut oser s'aventurer dans les bureaux, entre les ordinateurs du personnel de la galerie pour pouvoir s'abreuver. Contre toute attente, l'ambiance est presque bonne, on se sert soi-même, on se croirait à la maison. La maison propose d'ailleurs un large choix de jus de fruits, plusieurs variétés de biscuits apéritifs, du pop-corn, de la bière, vin rouge, vin blanc et même de la Badoit, pour les plus raisonnables. Il est donc conseillé de ne pas arriver trop tôt, si vous êtes encore un novice et culpabilisez à l'idée de devoir vous faufiler seul entre les assistants de galerie pour atteindre le banquet. Le petit plus, ce sont les bancs en bois (abrités), juste devant la galerie, qui permettent de s'en griller une à l'extérieur. Air de Paris : 32, rue Louise Weiss, 75013 Paris.

La buvette dorée : Fondation Ricard Mais comment ne pas y avoir pensé plus tôt ? L'indice était tellement évident que nous sommes nombreux à être passés à côté. Plus c'est gros, plus ça passe paraît-il. Vous avez peut-être été, comme moi, induits en erreur par le mot « Fondation ». N'ayez crainte, il est temps de rétablir la vérité. Alors que le nom de cette Fondation est associé à un alcool convivial, qui orne majestueusement toutes les tables des terrasses du Sud de la France, on n'aurait jamais imaginé la « Fondation Pastaga » installée entre la Concorde, la Madeleine et l'Elysée. Et pourtant, c'est à deux pas du faubourg Saint-Honoré que se trouve votre nouveau bar à pastis préféré. Un conseil : ne pas se laisser impressionner par la population sur place. Oui la moyenne d'âge a grimpé, on est passé de l'Est à l'Ouest, mais ce n'est pas pour autant qu'il faut se dévaloriser et ne pas oser : car du haut de votre jeunesse et de votre SMIC, vous êtes, vous aussi, une personne extraordinaire.

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Introduisez-vous dans l'immeuble, grimpez les escaliers, jetez un coup d'œil à l'exposition et traversez là complètement. La récompense ultime, le Graal de la Fondation se trouve en fin de parcours. Le Graal c'est son bar, bien évidemment. Rien d'ostentatoire, la décoration est fidèle à l'idée que vous vous faites de la marque. On se croirait presque dans un vieux bistrot, ce qui rend tout de suite l'atmosphère plus agréable. Pour accéder au comptoir il va falloir jouer des coudes et user de votre savoir-faire. Le personnel est sympathique, et la carte est une déclinaison de l'univers Ricard sous toutes ses formes. N'hésitez surtout pas à commander plusieurs verres  pour vos amis imaginaires car il y a foule. On passera sur le lieu de réception où l'on déguste entassé dans un hall d'immeuble son précieux breuvage mais la combine est tellement incroyable que l'on ne se permettra pas de cracher dans la soupe !

Fondation Ricard : 12 rue Boissy d'Anglas, 75008 Paris.

L'outsider : Triple V Triple V c'est votre nouvelle galerie préférée. Installée depuis un an dans un hôtel particulier de 400 m2 près de Palais Royal, l'étoile montante des galeristes contemporains est parvenue à mettre en place une ambiance sobre mais décontractée lors de ses soirées de vernissage. Premier bon point : le bar se situe à l'entrée des salles de l'établissement. Triple V a bien compris qu'un verre de vin n'était pas une récompense mais un moyen formidable d'accompagner une exposition.  Après des mois de recherches désespérées, j'ai enfin trouvé un endroit Jessica Parker, robe Gucci en moins. Rare endroit à proposer ponctuellement du champagne, les boissons sont servies par de charmantes hôtesses en uniforme, classe.

Mais ce qui fait véritablement le charme de cet endroit, c'est son ambiance sans chichi. Dans la plupart des vernissages parisiens, comme expliqué juste au-dessus, la tendance est à la rigueur tant au niveau de la profusion des « banquets », mais également au niveau de la tenue des gens qui s'y trouvent. La tendance est à la sagesse, au silence et à une certaine forme d'introspection face à l'œuvre. Rien de tout cela chez Triple V où le bruit n'effraie personne et les gens discutent pour de vrai, à gorge déployée, sans chuchoter. Enfin, je vous invite à profiter allégrement de la cour de l'établissement petit spot Marie-Antoinesque, qui fait son effet. Dernier conseil : ne pas arriver trop tard.

Triple V est au 5 rue du Mail, 75002 Paris.

Quand il ne s'empiffre pas à des vernissages mondains, Mathieu est sur Twitter.