Genesis Belanger, “Peter the Last Drag is for You,” 2016. Courtesy of the artist and Invisible-Exports
Un portrait de Frida Kahlo clope au bec fait office d’introduction à l’exposition « Frida Smoke » à Invisible-Export. Bien qu’elle ne soit pas présente sur les murs de la galerie new-yorkaise, la photographie en noir et blanc donne immédiatement le ton. Kahlo est vue en contre-plongée, elle porte la main — ongles délicatement vernis, lourdes bagues aux doigts — à sa cigarette. Cette image couplée au nom de l’exposition semble résonner comme un défi : Frida fumait. Comme bien d’autres artistes femmes, ou des femmes tout court.Longtemps considéré comme une activité exclusivement masculine, fumer est devenu un acte de rébellion au XXe siècle. Un arrêté interdisait même aux New Yorkaises de s’en griller une en public, sous peine d’amende ou d’arrestation. Cette exposition de six artistes femmes — Genesis Belanger, Anne Doran, Celeste Dupuy-Spencer, Ilse Getz, Irini Miga, Amanda Nedham — rompt avec le discours usuel pour offrir un nouveau regard sur le sujet. Leur travail a finalement moins à voir avec Kahlo et la représentation archétypale de l’association femme-cigarette mais porte plus sur les compulsions invétérées des artistes exposées.Seule une œuvre fait référence au contexte historique : Tomato Surprise d’Anne Doran (1998) — un collage capturant l’atmosphère des années 80. Fait d’images publicitaires et de magazines de l’époque, elle présente une image de femme nue, tenant une cigarette près de son sein — un intéressant rappel de l’objectification de la femme dans la publicité.Le reste de l’exposition s’intéresse davantage aux qualités esthétiques de la cigarette. Deux travaux d’Ilse Getz montrent des cigarettes, toutes plus ou moins consumées. Quatre sculptures et les deux peintures de Genesis Belanger juxtaposées des formes géométriques à des cigarettes géantes, presque phalliques, tandis que chez Amanda Nedham, la cigarette prend la forme d’animaux miniatures.L’exposition ne fait étonnamment pas mention de la riche relation entre la cigarette et le féminisme, le capitalisme ou le consumérisme. Cependant, les œuvres exposées — qui ont a priori peu à voir les unes avec les autres — offrent un regard neuf sur l’objet et ce qu’il représente, et rejettent le cliché de la cigarette comme simple accessoire.« Frida Smoke » est à voir jusqu’au 19 juin 2016 à la galerie Invisible-Exports, à New York.
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